L’équipe de GCCH a rencontré le Dr Daniel Hueskes et son fils Benjamin Hueskes. L’occasion pour les deux orthopédistes de nous parler de leur travail bénévole: la fourniture d’appareillages orthopédiques et la réalisation d’interventions chirurgicales sur des enfants et des jeunes adultes souffrant de handicaps.
Avant son premier voyage au Vietnam en 2003, Daniel Hueskes posa la question suivante à son fils: «Benjamin, qu’en penses-tu? Est-ce que c’est la bonne décision?» Son fils lui répondit alors ceci: «Oui, il te faudra juste renoncer à tes vacances.» C’est ainsi qu’il débuta sa coopération avec Green Cross Suisse il y a 19 ans.
L’une des priorités des projets d’orthopédie est qu’ils doivent avoir un impact durable. Fort de son expérience dans un autre projet, dans le cadre duquel il avait équipé 30 enfants d’orthèses puis, lors d’un contrôle de suivi, avait hélas dû constater que plus aucun des appareillages n’était présent sur leurs jambes, Daniel Hueskes se dit en 2003:
«Non, plus jamais ça! J’aimerais impliquer les (chirurgiens) orthopédistes locaux, et que le suivi médical soit réalisé avec des matériaux que l’on peut trouver au Vietnam. À défaut de pouvoir utiliser des matériaux de pointe, il faut encourager l’aide à l’entraide.»
Chez les enfants, dont la croissance est rapide, il est important que les orthèses et les prothèses puissent être renouvelées au bout d’un an. «Dès lors que la personne qui a confectionné la prothèse se trouve sur place, elle peut l’adapter en conséquence et fabriquer un nouveau plâtre», indique Daniel Hueskes.
Et Benjamin Hueskes d’ajouter: «L’idée est la suivante: former les gens au Vietnam pour qu’ils puissent réaliser le suivi médical eux-mêmes, y compris en notre absence. Cela a déjà été fait par le passé. Nous fournissons tout simplement un soutien ou conduisons des formations. Nous n’emmenons rien qui vienne de Suisse. L’idée n’est pas que les locaux nous demandent de fabriquer des plâtres et que nous les leur fournissions. Non, nous les confectionnons ensemble, sur place. Nous les aidons et nous les conseillons, mais ils sont parfaitement capables de faire cela eux-mêmes.»
Pour l’essentiel, les orthèses et prothèses nécessaires sont produites au Vietnam. Un point qui a son importance, car il faut tenir compte de plusieurs facteurs, dont par exemple l’humidité relative de l’air. Dans des cas exceptionnels, les orthopédistes vont au Vietnam en emportant du matériel depuis Bâle. Actuellement, ils préparent le suivi médical d’une jeune femme. Celle-ci n’a pas de tibia et ses os sont anormalement courts. Sans prothèse, elle marche sur son articulation. Pendant la pandémie, elle a été équipée de prothèses qui, néanmoins, pèsent 3,5 kg. Elle vient d’obtenir son premier emploi et se réjouit de pouvoir mener une vie autonome. Au travail, elle doit néanmoins porter ses lourdes prothèses en permanence. Raison pour laquelle deux éléments d’adaptation pour pied prothétique viennent de Suisse. Des éléments qui pèsent au moins 1,5 kg de moins, ce qui facilitera quelque peu le quotidien de la jeune femme.
«Je voulais savoir s’il voulait vivre»
Dans le cadre de leur bénévolat, Daniel et Benjamin Hueskes ont fait la connaissance de nombreuses personnes frappées par le destin. Nous leur avons demandé si, parmi les gens qu’ils avaient rencontrés au Vietnam jusqu’à aujourd’hui, il y avait une histoire qui leur était particulièrement restée en mémoire. «Oui», a répondu le Dr Hueskes avec émotion.
C’est quoi, l'”agent orange”?
L’agent orange est un défoliant chimique contenant de la dioxine (TCDD), un composant extrêmement toxique. Il doit son nom aux bandes de couleur orange peintes sur les fûts dans lesquels il était stocké. Au total, l’armée de l’air américaine en a épandu 45 677 837 litres entre 1962 et 1971, afin de détruire la jungle et de se donner un avantage stratégique dans la guerre du Vietnam. L’agent toxique TCDD perdure très longtemps dans l’environnement, et il est encore présent aujourd’hui dans les sols, les cours d’eau et, par conséquent, la chaîne alimentaire. Ce poison entraîne des mutations génétiques héréditaires, des malformations et de graves maladies.
Dr. Daniel Hueskes
Dès les années 1960, à l’époque des malformations dues au Contergan, Daniel Hueskes développe et fabrique des équipements orthopédiques innovants pour les enfants nés avec des membres atrophiés ou manquants.
La prise de Contergan, un médicament somnifère et sédatif, entraîne une recrudescence des malformations graves et de membres manquants chez les nouveau-nés.